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Hockey sur glace : portrait de Charlotte Cagigos, une gardienne chez les hommes

Hockey sur glace : portrait de Charlotte Cagigos, une gardienne chez les hommes

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Photo by Sameer Al-DOUMY / AFP

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Par Konbini Sports

Publié le

C'est la seule femme à évoluer dans une équipe pro masculine en France.

Sur la glace, une vingtaine de gaillards virevoltent à pleine vitesse, dans un cliquetis incessant de crosses et de palets. Face à eux dans la cage, Charlotte Cagigos, 21 ans, seule femme à évoluer dans une équipe pro masculine en France.

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Elle a chaussé ses premiers patins à l’âge de 3 ans à Montpellier, dans les traces de son frère aîné. Pour elle, pas de sauts ou de pirouettes mais très vite le lourd équipement du gardien de hockey sur glace. Et un rêve : celui de jouer en équipe de France et de disputer un jour les jeux Olympiques.

Pour cela, elle rejoint à 14 ans le Pôle France féminin à Chambéry. Son bac en poche, elle a cherché une autre structure pour progresser, mais pas facile pour une fille en France : les équipes féminines y sont rares et de niveaux très disparates. Pour pallier ce manque, la fédération autorise les jeunes filles à jouer avec les garçons, si besoin dans une classe d’âge inférieure. Jusqu’à 18 ans pour les joueuses de champ et à tout âge pour les gardiennes, poste plus technique et moins physique.

À 17 ans, la voilà donc en Normandie, où le pôle espoir des Drakkars de Caen lui ouvre les bras. “On a toujours eu des jeunes filles dans les équipes de garçons”, explique Luc Chauvel, l’entraîneur des Drakkars, qui évoluent en Division 1, le 2e échelon après la Ligue Magnus.

Tourbillon médiatique

Charlotte Cagigos travaille dur et gravit les échelons. Jusqu’à s’entraîner depuis l’année dernière avec l’équipe pro, dont le gardien titulaire Ronan Quemener reste à Rouen pendant la semaine. “Elle a apporté de la compétitivité, son éthique de travail, sa rigueur. Et surtout elle se bat tous les jours devant sa cage”, explique le coach.

“Elle fait du bon boulot”, confirme Emmanuel Alvarez, défenseur de 23 ans à la barbe rousse, venu de Saint-Pierre-et-Miquelon. “Au début, on se dit (…) qu’on va faire attention. Mais on peut shooter comme sur un autre gardien, c’est Charlotte qui veut ça, pour s’améliorer”.

Pour les compétitions, qui reprennent samedi, Quemener reste titulaire. Charlotte Cagigos joue avec les U20, souvent aussi avec l’équipe réserve en D3. Pas tout à fait pro, elle ne touche que des primes pour ses matches, mais le club et ses sponsors financent son matériel. Patin, casque, jambières, gants, plastron… L’ensemble atteint vite plusieurs milliers d’euros.

En janvier, elle a cependant disputé un match amical avec les pros. Son premier, et le coup d’envoi d’un tourbillon médiatique qu’elle n’avait pas vu venir et qui a intéressé jusqu’à la télévision canadienne. Dans les pays à forte tradition de hockey, les femmes sont en effet tout aussi rares dans les équipes d’hommes, puisque chaque club a sa formation féminine.

Rêve en Bleue

Regard bleu et sourire franc, Charlotte a traversé cela sans broncher : “C’est bien pour les petites filles, qu’elles voient qu’il faut s’accrocher, que le hockey n’est pas qu’un sport de garçons”. Parallèlement, elle a participé à plusieurs stages avec l’équipe de France féminine, qui cherchera en novembre à arracher un billet pour les JO de Pékin.

Avec les femmes, le jeu est différent. Les charges étant interdites, “le hockey féminin est beaucoup plus technique, les filles (…) arrivent plus à faire des feintes avec le palet. Les garçons, c’est plus rapide, ça shoote plus fort, c’est peut-être un peu plus brutal”, explique Charlotte Cagigos. Mais la bataille est rude chez les Bleues pour elle, actuellement N.4, alors qu’il n’y a que trois places.

“Elle a 21 ans, elle a encore du temps et de la maturité à prendre dans son jeu”, fait valoir Luc Chauvel. Et passer titulaire dans une équipe masculine? “Elle en a les capacités mais il y a des étapes à passer et du travail à continuer”.

Le travail, elle connaît. Outre les entraînements quasi quotidiens et les matches chaque week-end, parfois au prix de longs déplacements en car, elle vient d’entamer un master en éducation pour devenir institutrice. Installée avec son petit frère Marius, 19 ans, attaquant des Drakkars, elle voit défiler “des journées à 1.000 à l’heure, mais c’est la vie qu’on aime“.

Par Fanny CARRIER, AFP