“Il va se faire son palmarès au PSG”: Polo Breitner nous parle de “l’énigme Thomas Tuchel”

“Il va se faire son palmarès au PSG”: Polo Breitner nous parle de “l’énigme Thomas Tuchel”

photo de profil

Par Abdallah Soidri

Publié le

Dans leur dernier livre, Daniel Riolo et Polo Breitner tentent de résoudre "L'énigme Tuchel" (Hugo Sport). Entretien.

À voir aussi sur Konbini

“Pour certains Allemands, il est déjà le meilleur coach du monde. Pour d’autres, il ne sait pas gagner les matches importants.”

On classe souvent les entraîneurs dans deux catégories : les dogmatiques et les pragmatiques. Est-ce qu’il entre dans l’une de ces deux cases ?
L’une des plus belles phrases de Thomas Tuchel est la suivante : “Johan Cruyff et Pep Guardiola nous ont laissé un très beau cadeau, mais c’est aussi lourd à porter”. Je crois que cela veut tout dire, c’est son chemin de croix. C’est son école, celle de l’esthétisme, la recherche du beau, et cela vous devez l’accepter. Ou tout du moins le prendre en compte. Le fait qu’il ait été formé dans le culte du Borussia Mönchengladbach des années 1970 n’est pas neutre bien entendu.
On revient à l’écriture du livre : pourquoi ce titre “L’énigme Tuchel” ?
Au départ, c’est un petit hommage à la presse allemande qui a tendance à utiliser quelques titres génériques comme “le cas X”, “le dossier X”, “l’énigme X” ou encore “l’affaire X”, lorsqu’une thématique est importante ou bien polémique. L’énigme aussi puisque Thomas Tuchel s’exprime globalement peu. Derrière les critiques qu’il a subies dans son pays d’origine se cache le théâtre d’ombres du football professionnel allemand, les luttes intestines, les ego surdimensionnés de certains de nos interlocuteurs, la méchanceté. Sans oublier, peut-être, le plus important : nous sommes dans un football qui bouge énormément. Il suffit simplement de s’arrêter à la réunification allemande et ses 16 millions de citoyens supplémentaires en provenance de la RDA. Il y a donc des “énigmes”, et c’est au lecteur ou à la lectrice de se faire son propre avis.
Combien de personnes avez-vous rencontrées pour tenter de percer “l’énigme Tuchel” ?
En tout quinze ou vingt personnes. Puis après il a fallu sélectionner certains passages plus pertinents que d’autres. Les interviews se sont très très bien passées, peut-être mes interlocuteurs ont-ils été surpris par mon empathie pour le football allemand (rires) ?


Vous le dîtes dans le livre : Tuchel ne parle pas, il n’aime pas l’exercice. Comment fait-on pour écrire un ouvrage sur une personne qui ne s’épanche que très rarement dans la presse, notamment pour trouver les informations les plus justes sur lui ?
C’est assez simple, et démontré dans l’introduction de l’ouvrage. Mais tout d’abord, il est important de dire que nous avons laissé la vie privée pour ce qu’elle est, c’est-à-dire privée. Le livre n’a aucune vocation à détenir “LA” vérité absolue sur le personnage. Les interlocuteurs l’ont tous côtoyé, certains plusieurs années de suite. Ils affirment leur vérité dans un environnement particulier. Je pense que nous apportons des informations supplémentaires. Très honnêtement, s’il y a un test panel après la découverte du livre, aucun lecteur n’aura la même vision du personnage. Et c’est tant mieux.
Tuchel fait partie de ces entraîneurs qui n’ont pas eu une grande carrière de joueur. À quel point cette expérience a influencé son parcours d’entraîneur ?
Je pense que lorsque vous avez entendu depuis votre plus tendre enfance que vous allez un jour “évoluer en Bundesliga”, que vous avez tout sacrifié pour y arriver et qu’une blessure vous stoppe, le choc émotionnel est terrible. De mon point de vue, et pour donner une image empruntée au cyclisme, c’est un “gregario” même si sa technique balle au pied était plus que correcte. Aussi, lorsqu’il voit des grands champions qui ne se donnent pas à 100%, je pense que c’est difficile à accepter pour lui. Entre être un “modeste” joueur de Bundesliga et un grand coach, Thomas Tuchel choisirait la première option.

“Entre être un ‘modeste’ joueur de Bundesliga et un grand coach, Thomas Tuchel choisirait la première option.”

Avec une telle trajectoire de carrière – de Stuttgart au PSG -, prendre la tête de la sélection allemande dans un avenir plus ou moins long est-il envisageable ?
C’est beaucoup trop tôt et il y a des noms prévus avant lui, sans oublier qu’un retour au pays pourrait raviver quelques plaies. Le retour du “Motzki” ! Et puis, honnêtement, la véritable question que la Nationalmannschaft doit se poser tout comme la Fédération est la suivante : comment a-t-on pu conserver Joachim Löw à la tête de la sélection après cette campagne de Russie en 2018 ? Un peu d’amour-propre que diable !