“Les gens sont déçus, c’est leur problème” : entretien avec Hadja de Koh-Lanta

“Les gens sont déçus, c’est leur problème” : entretien avec Hadja de Koh-Lanta

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© Laurent Vu/ ALP /TF1

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Par Abdallah Soidri

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"Quand on voit quelqu'un de direct comme moi, ça dérange."

Avec son caractère bien trempé et son franc-parler, Hadja s’est rapidement imposée comme une candidate marquante de cette saison de Koh-Lanta : Les 4 Terres. L’ex-candidate de la tribu de l’est, puis de la tribu rouge a toujours parlé sans filtre, sans se soucier si cela allait passer ou casser.
Deux semaines après son élimination suite au premier conseil de réunification, la handballeuse rémoise revient pour Konbini Sports sur son aventure. Et comme sur le camp, elle y va franco. Entretien.


Konbini Sports | Presque un an s’est écoulé depuis la fin du tournage de cette saison de Koh-Lanta. Avec le recul, quel bilan tires-tu de ton aventure ?
Hadja | J’en suis très fière, parce que j’ai été fidèle à moi-même. J’avais peur de me transformer pour les gens, mais je suis restée directe et franche. J’étais comme dans la vraie vie, même si à l’écran on ne voit pas toutes les facettes de ma personnalité. J’ai aussi beaucoup d’humour, je ne pousse pas tout le temps des coups de gueule. Mais dès que quelque chose ne me plaît pas, je le dis. Les gens peuvent penser que c’est un défaut, mais je trouve que c’est une de mes qualités.
Comment tes proches ont-ils réagi en te voyant à l’écran ?
Ils ont tapé des barres. On a dit à mes coéquipières que j’étais dure, mais elles ont répondu que je n’étais pas méchante, juste directe. Les gens confondent : dès qu’on a du caractère, on passe pour une personne prétentieuse et méchante, alors que c’est faux. Ce monde est gangrené d’hypocrites. Quand on voit quelqu’un de direct comme moi, ça dérange.
Pas mal de gens s’attendaient à ce que tu fasses mieux lors des épreuves sportives, à cause de ton statut de handballeuse, et ont été déçus. Partages-tu ce sentiment ?
Je ne suis pas d’accord avec eux. J’avais l’habitude de manger cinq repas par jour, alors passer à aucun dans la journée, c’est plus dur pour les sportifs. Si les gens sont déçus, c’est leur problème. Je me suis donnée à fond et c’est le plus important. Sur toutes les épreuves, on aurait pu faire mieux. Il n’y a que ceux qui ont vécu Koh-Lanta qui savent quels efforts on fait. On peut toujours s’améliorer, mais le plus important c’est de se donner à fond. Je n’ai aucun regret.

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Tu joues au handball à haut niveau, donc tu es déjà soumise au stress de la compétition et du résultat. Pourquoi t’inscrire à Koh-Lanta ? Qu’est-ce tu recherchais ?
Koh-Lanta, c’est très différent de ce que je peux connaître. Je suis internationale sénégalaise et quand je joue des matches en coupe d’Afrique, c’est hyper stressant. En général, en compétition, je perds entre 4 et 5 kg à cause de la pression. Koh-Lanta, ça n’a rien à voir, déjà parce que c’est un jeu d’aventure. J’y suis surtout allée pour me tester et évoluer dans des conditions précaires avec ce que j’appelle des “moldus”. Parce que dans le sport de haut niveau, on est chouchoutés et il y a beaucoup de gens comme moi, francs et directs. Être avec des “moldus” de Koh-Lanta, c’est différent.
Sur le plan physique et mental, qu’est-ce qui est le plus dur entre Koh-Lanta et une compétition internationale de handball ?
Au niveau physique, Koh-Lanta c’est très compliqué. Car sans nourriture, c’est dur pour moi. Par contre, mentalement, les compétitions de handball sont plus difficiles. Je me souviens de la dernière demi-finale que j’ai jouée, contre le Congo, c’était un match très compliqué. Toute une nation compte sur nous. Une compétition, c’est deux ans de travail, rien à voir avec Koh-Lanta.
Imaginais-tu vivre une telle précarité ?
Pas du tout. Et c’est cent fois pire que ce qu’on peut imaginer. J’ai l’habitude de jeûner durant le mois de ramadan, mais c’est totalement différent parce qu’on mange le soir ; là, tu ne penses qu’à la faim.
Revenons sur ton élimination. On a l’impression que tu as payé le manque de cohésion chez les ex-verts, alors que vous étiez six au moment de la réunification. Comment expliques-tu que les liens dans l’équipe de départ n’ont pas tenu ?
Avant de partir, on s’était dit qu’on resterait tous ensemble. Je n’ai pas été étonnée qu’Alexandra ne me soutienne pas, car elle s’était rapprochée d’Angélique. Mais quelqu’un comme Laurent, ça m’a déçue. Il se cache en disant qu’il n’avait pas de pacte avec nous, les ex-verts, mais c’est un menteur.


Comment as-tu vécu cette élimination ?
Je savais déjà que j’allais sortir. Bertrand-Kamal m’avait dit qu’il allait parler avec Laurent, mais je ne suis pas là pour faire la lèche-botte. Les autres ne me connaissaient pas, donc je peux comprendre qu’ils votent contre moi. Mais quand ça vient de gens que je connais, je ne comprends pas.
Donc les excuses sur ton comportement sur le camp pour justifier ton élimination sont fausses, selon toi ?
Bien sûr. À partir du moment où je pars, dites-moi la vérité. Les gens se cachent derrière des excuses bidons. En réalité, je l’avais un peu fait exprès avec le riz. Je savais que j’allais partir donc je comptais tout manger avant, mais je n’en ai pas eu l’opportunité. Aussi pourquoi construire une cabane alors qu’on sait qu’on ne va pas dormir dedans ?
Au moment de partir, tu accuses Alix d’être à l’origine de ton départ, alors que ce n’était pas du tout le cas…
Je pensais que c’était elle la tête pensante, parce que depuis l’épreuve de la boue, où je l’avais un peu narguée, nos relations n’étaient pas au top. En fait, c’était Dorian. Il était parano et il s’est inventé un truc, alors que je n’ai jamais cité son nom. Avec Alix, nos relations sont très bonnes maintenant. On s’appelle toutes les semaines. C’est l’une des aventurières que j’aime le plus.

“J’avais trouvé un nouveau frère”

La nouveauté depuis quelques saisons de Koh-Lanta, ce sont les réseaux sociaux, où les commentaires sont parfois très violents. Y étais-tu préparée ?
Comme je suis noire, je savais déjà que j’allais subir des insultes racistes. Ce n’est pas nouveau, depuis l’âge de 12-13 ans, j ‘y suis confrontée. Quand Alix gueule, les gens disent qu’elle a du caractère. Quand c’est moi, c’est agressif. C’est une forme de racisme, inconscient, certes, mais c’en est. Que les gens me critiquent par rapport à Koh-Lanta, ça ne me fait ni chaud ni froid. Que mon caractère ne plaise pas à certaines personnes, ça ne me dérange pas. Depuis mon passage dans l’émission, je reçois beaucoup de messages de femmes qui me disent “enfin quelqu’un de vrai, avec du caractère et qui l’assume”. Dans le contexte actuel, ça me fait plaisir de pouvoir inspirer des femmes.
On l’a vu, tu étais très proche de Bertrand-Kamal dans l’aventure. Peux-tu nous parler de la relation que vous aviez tous les deux ?
Bertrand-Kamal est ma plus belle rencontre de Koh-Lanta – avec Joaquina. Il a tout de suite compris qui j’étais et on s’est dit qu’on irait jusqu’au bout ensemble. Jamais on ne se serait trahis. On a vite eu une relation frère-soeur. Lui le froid ; moi le chaud. Il me tempérait. Il s’est beaucoup occupé de moi là-bas. Le soir, quand il faisait froid et que je tremblais, il venait me voir. Quand il y avait du mauvais temps, il essayait toujours de nous faire sourire. Ça nous a beaucoup rapprochés. On a aussi eu des histoires compliquées tous les deux, on n’est pas des gosses de riches, on vient des mêmes endroits, alors on s’est compris. Je connais des choses de sa vie que ses amis ne connaissent pas et réciproquement. J’avais trouvé un nouveau frère.
Avez-vous gardé cette proximité une fois rentrés en France ?
C’était pareil au retour. Après deux jours, je l’appelle en vidéo, il m’avait tellement parlé de ses parents que je voulais les voir. On avait plein de projets. On devait aller le voir jouer à Avignon, parce qu’il devait y être tout le mois de juin pour un spectacle. Malheureusement, cette maladie est arrivée. Je n’ai jamais imaginé qu’il partirait. Je n’étais pas préparée à ce qu’il parte. D’en reparler me fait terriblement mal au cœur. Je suis restée avec lui jusqu’au bout. J’étais là pour lui et je serai là pour ses parents. Ils sont très courageux. Ils sont toujours là, avec le sourire. J’ai énormément de respect pour eux.
Au moment de l’annonce de son décès, on ne savait pas trop si l’émission allait continuer. Qu’en as-tu pensé ?
Cette affaire m’a un peu agacée. Le plus important, c’est Bertrand-Kamal et sa famille. Il m’avait dit : “Hadja, s’il m’arrive quelque chose, je veux que l’émission continue, que mes parents soient fiers de moi et voient ce que j’ai fait.” Donc pourquoi priver sa famille de ses exploits, sachant que participer à Koh-Lanta était son rêve.